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Somalie : Entre Déchets Toxiques, Piraterie et Désespoir – Une Enquête au Cœur d'un Territoire Ravagé

 Somalie : Entre Déchets Toxiques, Piraterie et Désespoir – Une Enquête au Cœur d'un Territoire Ravagé


Somalie : Entre Déchets Toxiques, Piraterie et Désespoir – Une Enquête au Cœur d'un Territoire Ravagé



La Somalie est un pays aux multiples facettes : un territoire ravagé par la guerre civile, une terre de famine, et un foyer de piraterie endémique. Au cœur de ce chaos, une nouvelle menace semble avoir émergé, selon des rumeurs persistantes : le déversement de déchets toxiques le long des côtes somaliennes. Ce phénomène ne touche pas seulement l'environnement, mais affecte aussi directement la santé des populations locales et nourrit un cycle de violence et de désespoir. Dans cet article, nous plongeons dans l'ombre de la Somalie, entre les déchets, la piraterie et la lutte pour la survie.


Somalie : Entre Déchets Toxiques, Piraterie et Désespoir – Une Enquête au Cœur d'un Territoire Ravagé


Le Village de Lida et les Fûts Mystérieux

Lida, un petit village de pêcheurs, se situe sur la côte somalienne. En 2005, un tsunami dévastateur a frappé cette région, et ce sont ses terribles conséquences qui ont révélé un autre danger caché : des fûts mystérieux retrouvés sur la plage. Certains barils, en apparence abandonnés, ont été identifiés comme des contenants de déchets toxiques. Les habitants du village ont rapidement signalé une série de problèmes de santé, allant des maladies de peau aux troubles plus graves, qui ont suivi cette découverte.

En 2006, une ONG est intervenue pour inspecter la zone. Malgré l'inhospitalité du terrain et la menace que représentent ces barils, les experts n’ont pu établir une identification précise de leur contenu. Un spécialiste allemand en déchets toxiques a déclaré n'avoir jamais vu une situation aussi inquiétante. Le plus alarmant, toutefois, était l'absence totale de toute mention d'origine ou de contenu sur ces fûts, générant une peur grandissante parmi les habitants, qui osaient à peine s’approcher de ces containers mystérieux.


Somalie : Entre Déchets Toxiques, Piraterie et Désespoir – Une Enquête au Cœur d'un Territoire Ravagé


Obiou, la Capitale des Pirates

Obiou, une zone côtière autrefois prospère grâce à la pêche, est aujourd'hui le centre de la piraterie somalienne. La mer, autrefois riche en poissons, est désormais désertée. Les pêcheurs locaux blâment les déchets toxiques, qui auraient, selon eux, détruit les écosystèmes marins. Nombreux sont ceux qui ont été contraints de se tourner vers la piraterie pour survivre.

Le témoignage d'un ancien pêcheur devenu pirate illustre ce choix tragique : "Nous avons tout perdu. Les poissons sont morts. L'eau est contaminée. Alors, pour survivre, certains d'entre nous ont pris les armes." Les déchets toxiques, qui "fument encore", continuent de polluer l'environnement et d'affecter la santé de la population locale, entre infections cutanées et troubles respiratoires.

Mogadiscio et le Gouvernement Fantôme

Mogadiscio, la capitale, est le cœur d’une Somalie dévastée par les guerres civiles. La ville est divisée, et le gouvernement, en réalité un "gouvernement fantôme", est retranché dans un bunker, incapable de contrôler la situation. Le vice-premier ministre, responsable de la gestion des côtes, se montre impuissant face aux déchets toxiques qui s'amoncellent le long des plages, et la situation est exacerbée par la présence des Shebabs, qui rendent l'accès aux zones affectées extrêmement difficile.

L'Hôpital de Mogadiscio et les Déformations Génétiques

Dans la capitale, l'hôpital central est confronté à une épidémie tragique de déformations génétiques, particulièrement visibles chez les enfants. Des malformations de l'appareil génital et urinaire se multiplient, sans explication scientifique concrète. Le manque d’infrastructures et d'outils diagnostiques rend impossible toute recherche approfondie, mais ces anomalies, dont le nombre a significativement augmenté au cours des deux dernières décennies, sont un signe alarmant d'une pollution environnementale systémique, possiblement liée à l'exposition aux déchets toxiques.

L’Enquête d’Ilaria Alpi et le Trafic de Déchets

En 1994, la journaliste italienne Ilaria Alpi, lors de son enquête sur la situation en Somalie, découvre un aspect inquiétant de cette crise : le trafic illégal de déchets toxiques. Ses investigations révèlent que des bateaux de pêche, appartenant à l’entreprise Chivco, ne transportaient pas du poisson, mais bien des déchets toxiques. Après avoir rencontré un chef de guerre local et tenté d'obtenir des informations sur le contenu des bateaux, Ilaria Alpi et son caméraman ont été assassinés dans des circonstances mystérieuses à Mogadiscio, un crime resté impuni. Son travail a néanmoins mis en lumière l'implication de réseaux mafieux dans ce trafic.

Le Réseau Scalione et les Affairistes

Le trafic de déchets en Somalie était géré par un réseau international d'affaires douteuses, avec à sa tête des figures comme Ezio Scalione, ancien consul honoraire de Somalie, et le transporteur Giancarlo Marocchino. Scalione, selon les écoutes téléphoniques interceptées, proposait des tarifs avantageux aux industriels italiens pour éliminer leurs déchets toxiques en Somalie. Des opérations frauduleuses, qui impliquaient même le président somalien de l’époque, Ali Mahdi, ont été dénoncées, mais rien n’a jamais été fait pour stopper ce commerce mortel.

Les Aveux d’un Repenti et l’Implication Internationale

Sebris, un repenti du réseau de trafic de déchets, a révélé l’ampleur des opérations illégales auxquelles il avait participé. Selon ses témoignages, ces réseaux ne se limitaient pas à la Somalie, mais s’étendaient à d’autres pays en développement, comme Haïti et le Mozambique. Il raconte l’horreur des sites de déversement de déchets radioactifs en Haïti, où des populations entières ont été dévastées par des maladies liées à la radioactivité. Sebris a travaillé pour la division antimafia de Milan et a dénoncé l’implication d'hommes d'affaires respectables, ainsi que de gangsters, dans ce commerce immoral. Parmi eux, l'italo-américain Nicolas Bizzio et le vendeur d’armes syrien Manzur El Kassar, qui finançaient les opérations en Somalie tout en fournissant des armes aux milices.

La Somalie est le théâtre d’une tragédie silencieuse. Les responsables du trafic de déchets toxiques, malgré les enquêtes et les témoignages, restent pour la plupart impunis. Le lien entre pollution, guerre et piraterie est indissociable, et la souffrance des populations locales continue d’être ignorée par la communauté internationale. Si la Somalie ne reçoit pas une aide substantielle et ciblée pour mettre fin à ce cycle, son avenir demeure sombre. Il est urgent de prendre conscience de l'ampleur de la crise et de passer à l’action, avant que le pays ne sombre définitivement dans le désespoir.

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